Avant même d’entreprendre mon voyage nautique, l’excitation me gagne très vite… moi qui ai toujours vécu ici, je considère la Canche, espiègle fleuve qui traverse la ville de part en part, comme un compagnon de route : où que l’on soit en ville, elle finit toujours par apparaître malicieusement au coin d’une rue ou surgissant dessous une maison.
Aujourd’hui enfin, la Canche m’autorise à entrer dans son intimité pour percevoir les entrailles de la cité hesdinoise, que je découvre en canoë, sous un angle totalement inédit !
Mon embarcation s’engouffre sous les neufs ponts à l’architecture à chaque fois différente et surprenante. On m’a si souvent parlé des brasseries d’antan et voilà que je passe devant les vestiges de ce qui fut la roue d’un moulin…
L’émotion me gagne, les souvenirs d’enfance refont surface : le temps de ces ruelles pittoresques traversées au bras protecteur de ma grand-mère, le tintement des cloches du beffroi, gardien du temps fièrement dressé sur la place pavée, l’ambiance festive et animée du marché du jeudi, l’odeur enivrante du nougat des fêtes foraines de décembre…
Voguant ici, je surprends l’Abbé Prévost tenant la plume qui donnera vie à Manon; voguant là, Le Fauconnier fige l’abreuvoir à chevaux sur sa toile ; plus loin, je croise le regard complice du jeune Blondin s’essayant sur un fil comme s’il franchissait le Niagara !
Bien plus qu’une découverte, cette traversée en canoë est un véritable voyage initiatique….
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